Il y a cent ans, l’immense majorité des délégués ouvriers présents au 2nd congrès (30 octobre-1er novembre 1910) de la confédération catalane Solidaridad Obrera décidaient, dès la deuxième session de leur assemblée, de transformer l’organisation régionale catalane en une confédération nationale, regroupant toutes les sociétés ouvrières espagnoles restées à l’écart de l’Union générale des travailleurs, d’obédience socialiste. Constituée en juin 1907 dans le but de rassembler tous les travailleurs de Barcelone sur des bases purement économiques, Solidaridad Obrera avait indiqué le chemin à suivre pour permettre au mouvement ouvrier barcelonais de sortir peu à peu du marasme causé par le fort chômage existant dans la ville et l’échec de la grève générale de 1902. En septembre 1908, au cours du 1 er congrès de l’organisation ouvrière, celle-ci s’était transformée en une confédération régionale, au sein de laquelle coexistaient encore républicains fédéraux, socialistes et anarchistes. Prévu pour l’été 1909, le congrès suivant devait envisager la transformation de SO en une confédération nationale mais les événements de la fin juillet 1909 – la « Semaine tragique », le nom donné aux sept jours pendant lesquels la capitale catalane, la légendaire « Rose de feu », s’embrasa une fois de plus – en décideraient autrement.
Reporté à la fin du mois d’octobre de l’année 1910, le congrès organisé au Palacio de Bellas Artes allait entériner la naissance d’une nouvelle confédération ouvrière, fondée sur le principe de l’action directe, et très proche dans son inspiration de la CGT française de l’époque, encore dominée alors par le courant syndicaliste révolutionnaire. Le présent volume est la traduction du compte rendu paru le 4 novembre 1910 dans les colonnes de « Solidaridad Obrera », l’organe hebdomadaire de la confédération SO depuis 1907.
À défaut des actes de ce congrès, ce compte rendu – inédit à ce jour en langue française – est le seul document que nous ayons sur la naissance de la Confederación Nacional del Trabajo, le syndicat qui sera appelé à marquer de sa forte empreinte l’histoire sociale espagnole des décennies suivantes.