Sandormokh. Ce charnier abrite, dans une forêt perdue de Carélie, 236 fosses où ont été retrouvés les restes des fusillés de la Grande Terreur. Ce site est devenu l’un des principaux lieux de mémoire et de recueillement en souvenir des victimes des purges staliniennes de 1937-1938, au cours desquelles près de 800 000 personnes ont été abattues d’une balle dans la nuque dans le plus grand secret. Le charnier de Sandormokh est situé non loin de Medvejegorsk, ville tristement célèbre pour avoir abrité le Quartier général de l’OGPU, puis du NKVD.
Il a été mis au jour en 1997 par lrina Flige, louri Dmitriev et Veniamine loffé. Tous trois ont lutté au sein de l’association Memorial contre une réécriture de l’histoire de la Grande Terreur, qui est aujourd’hui toujours aussi vicace au sein du discours officiel russe. Leurs recherches sont un acte de résistance civile. Le livre d’lrina Flige retrace fidèlement les circonstances d’une véritable enquête, à la fois dans les archives et sur les lieux des exécutions, pour retrouver un chaînon manquant de l’histoire de son pays.
Il rétablit un chantier historique nécessaire, où sont intriqués toutes les strates d’une "mémorialisation" conflictuelle, mettant en jeu les familles des victimes, les associations nationales (polonaises, ukrainiennes, etc.) et le pouvoir en place. Construit comme une aventure intellectuelle, cet ouvrage a été écrit à l’intersection de plusieurs genres : le lecteur y trouvera des éléments de recherche historique, d’analyse culturelle, de témoignages racontés et de journalisme.
C’est ce qui en fait un document unique parmi les ouvrages consacrés aux répressions staliniennes.