Selon le Littré, rêver à la suisse, c’est « avoir l’air de penser à quelque chose, et ne penser à rien ». Henri Calet se joue de la polysémie et adopte la formule pour ce petit recueil de chroniques achevé d’imprimer en décembre 1948.
Rêver à la suisse est pourtant bien un livre sur la Confédération Helvétique, « … le pays où l’on meurt en cueillant des edelweiss ». Sortie de la guerre, la France est en liesse. Calet choisit lui de se rendre en Suisse pour quelques brefs séjours. L’écrivain tient un journal, observe avec distance et malice. Ces récits fragmentaires, véritables prouesses stylistiques, sont des reportages insolites sur un pays resté « neutre et prospère » qui lui parait tout de même très étranger ! Avec candeur ou ironie, Calet s’attarde sur mille détails, la qualité des marchandises, la politesse des commerçants, l’abondance des distributeurs automatiques et la facilité avec laquelle il est possible de se procurer des cigarettes. L’écrivain se montre toujours bienveillant, il sourit avec nostalgie : en temps de paix comme en temps de guerre, la vie est bien dérisoire !