"Autre fait de folklore, la sorcellerie rurale pose des problèmes un peu différents : elle est exacerbée à partir du XVIe siècle par la Réforme et par la Contre-Réforme : celles-ci, en épurant la religion de ses aspects les plus magiques, expulsent le Prêtre de ses fonctions médiumniques, et le transforment en petit fonctionnaire du culte. Réforme et Contre-Réforme, à force de tonitruations néo-théologiques contre le péché et contre Satan, donnent donc au Malin des rôles toujours plus importants. Elles confèrent de ce fait à la sorcière et à la sorcellerie villageoises une importance très grande aux XVIe et XVIIe siècles. Douée de pouvoirs maléfiques, dont peu de gens, à l’époque, contestent l’efficacité, la sorcière est en mesure de faire souffrir et de faire chanter ses adversaires, souvent haut placés. Elle incarne ainsi la revanche de la pauvresse contre le riche, et de la femme contre le chauvinisme mâle des phallocrates."
Cet essai brillant mêle les disciplines – démographie, sociologie, histoire et économie – pour expliquer l’évolution depuis ses origines de la civilisation rurale de l’Europe occidentale. L’auteur aborde l’impact du développement des technologies, notamment les nouvelles techniques de culture qui ont bouleversé les données démographiques. Ce faisant, il dresse un panorama synthétique des origines de notre civilisation, de nos traditions et de notre folklore.
Mais cet essai est aussi une analyse politique : il explique les rapports de domination, notamment l’asservissement des populations paysannes et l’importance des regroupements humains, aux fondements de notre société. L’argumentation est en outre enrichie par de nombreuses comparaisons avec d’autres peuples ou ethnies, ce qui rend plus tangible encore au lecteur moderne sa propre histoire.