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Floreal Cuadrado : Comme un chat

Comme un chat

Souvenirs turbulents d’un anarchiste, faussaire à ses heures, vers la fin du vingtième siècle

Fils aîné d’une famille de militants libertaires espagnols convaincus et déterminés, piliers de la CNT, Foréal Cuadrado raconte dans ce livre de mémoires ce que peu de militants, étrangement, ont raconté : son enfance, son éducation au quotidien dans les quartiers de Béziers, ses premières amours et cette volonté chevillée au corps de devenir un « bon petit Français » ordinaire, bien intégré, loin d’un encombrant héritage politique. Sa vie d’ouvrier chez Fouga, la grosse entreprise de la région, et la rencontre de vieux militants syndicaux vont très tôt faire de lui un opposant farouche aux hiérarchies bureaucratiques, mais il se sentira dans un premier temps très peu en phase avec la révolte étudiante de 1968. Les chemins de l’autonomie individuelle sont bien souvent tortueux et inattendus : c’est grâce à sa famille qu’il rencontre un certain Nerslau, un ingénieur chimiste selon lequel les anarchistes doivent se préparer de toute urgence à répondre à la répression brutale à venir. Le voilà sur les sentiers étranges, souvent tragi-comiques, d’un anarchisme prônant l’action pour l’action, échafaudant de façon un peu saugrenue un réseau d’activistes se préparant à en découdre violemment avec l’« État policier » et ses multiples sicaires. Et il va mettre les compétences d’artificier acquises durant son service militaire au profit de la préparation de la lutte armée révolutionnaire. Les rencontres se multiplient. Il explore la diversité du milieu libertaire, fréquente le « gratin » de l’extrême-gauche révolutionnaire parisienne, côtoie des figures marquantes comme Denis Guedj ou Alexandre Grothendieck, le bâtisseur reconnu de l’écologie radicale et l’un des rares scientifiques de haut vol qui déserta les chimériques fadaises d’un progrès inexorable. Les méfaits réitérés, cruels et surannés du trop vieux Franco l’embarquent dans le combat des GARI. Il participe à de nombreuses actions, dont l’enlèvement du banquier Suarez ou la tentative d’enlèvement de Michel Hidalgo. Entré en clandestinité, il devient faussaire par un picaresque concours de circonstances, pour palier quelques défections militantes, et se prend de passion pour ce métier de l’ombre. Il travaille alors avec prudence et méticulosité pour le mouvement libertaire. Après quelques chamailleries épiques, vient le temps des arrestations et des interrogatoires, la cour de sûreté de l’État et la prison. Il lui faudra ensuite prendre le chemin de l’exil au Venezuela, où il sera accueilli par l’ancien chef de l’une des guérillas vénézuéliennes, Douglas Bravo, l’ancien mentor de Hugo Chavez. Cet exil sera aussi une forme de pause, loin de Paris, qui lui permettra de réfléchir à ses démêlés judiciaires et de préparer son combat pour l’amnistie lors du procès du hold-up de Condé-sur-l’Escault. Comme un chat, Cuadrado est souvent retombé sur ses pattes. Selon lui, le seul sauf-conduit qui lui a permis de surnager dans ce siècle de ténèbres est l’éthique rigoureuse et exigeante que lui ont transmise par l’exemple ses parents et amis anarchistes espagnols.