Le système contemporain, par défiance, par cynisme, mais surtout par sa logique propre, bannit l’exubérance de la vie. Son efficacité est fondée sur la reproduction à l’identique de mécanismes exacts et disciplinés. Selon les règles de ce système mortifère, les adultes seraient des êtres voués au travail et les enfants, adultes en devenir, devraient s’adapter le plus rapidement possible à leur futur tout tracé. Dès leur plus jeune âge, les enfants sont assimilés à des consommateurs avec des besoins spécifiques, ou des producteurs de biens à part entière. Mais nous aurions tort de croire que les enfants non travailleurs sont épargnés par l’idéologie du travail. À l’école, à la maison, dans les médias, tout est fait pour qu’ils admettent qu’ils devront plus tard produire de prétendues richesses. Dans ce monde glacé de la Mégamachine, l’enfance est une étape improductive dont il s’agit de réduire au minimum la durée. Ce sont pourtant les enfants qui, par leur exubérance et leur émerveillement devant le monde, nous offrent spontanément une leçon de savoir-vivre. Et de savoir-lutter.