Année 2007
Non, les pétrodollars du Moyen-Orient n’ont pas fini de faire parler d’eux. Le pétrole s’épuise, mais pas les absurdités auxquelles il conduit. La ville de Dubaï (Émirats arabes unis), que le sociologue américain Mike Davis décrit dans ce court texte, est l’exemple extrême de cette obscénité de – et pour –
nouveaux riches du monde entier. Reconnu notamment depuis sa fabuleuse étude sur l’urbanisme de Los Angeles – et donc du rapport entre celui-ci et les domaines sociaux, politiques et économiques – (City of Quartz, La Découverte, 1998), il s’attaque ici à ce mirage high-tech aux portes du désert. Si on y trouve un « ski-dôme », des îles artificielles ou la plus haute tour du monde, l’envers du décor en dit long... En effet, de par l’exploitation
sauvage des travailleurs semi-clandestins venus d’Inde, du Bengladesh ou encore de Chine, le « village global » de Dubaï a plus à voir avec le Métropolis de Fritz Lang (1927) qu’avec une hypothétique tour de Babel : code du travail et conventions collectives sont des mirages. Avec des salaires et des logements dignes de Germinal, les travailleurs du bâtiments eux-mêmes sont totalement invisibilisés aux yeux de riches qui, tels les zombies de George Romero dans Dawn of the Dead (1978), fréquentent les innombrables et hyper-luxueuses galeries commerciales. Dubaï est l’exemple ultime de la violence et de la gabegie du capitalisme globalisé.
À l’origine publié dans la New Left Review en 2006, ce texte a par la suite été intégré à l’ouvrage Paradis infernaux, publié en 2009 par Les Prairies ordinaires, qui regroupe des analyses sociologiques sur quelques-unes des plus monstrueuses mégalopoles mondiales. Nous n’avons donc pas manqué d’inviter Mike Davis lors d’un passage à Paris en juin 2008 à venir nous présenter ses différents livres et à débattre avec ses lecteurs qui avaient répondu présents en nombre. Ce fut mémorable !