El Djazaïr est un pavé dans le marigot où le triste cortège de ceux qui sont passés du col Mao au Rotary nous somment de les rejoindre. El Djazaïr s’offre volontiers à la colère de qui le descelle, il est la fortune du sans-grade, la providence du prolétaire, la politesse du colonisé. À l’heure où l’on disserte, avec un aplomb sans pareil, à propos de la violence de l’insurrection algérienne emportant tout sur son passage tel un fleuve sorti de son lit. Il nous rappelle que la première violence fut celle des rives qui l’enserraient. Et de cette violence coloniale, ceux qui se prélassent dans le marigot ont à coeur de taire la cruauté ordinaire et l’insondable cupidité. Notre pavé El Djazaïr est une oeuvre minérale. Elle affleure des soubassements, du temps long. 34 ans après sa publication en espagnol, son trait ne s’est pas émoussé. Le dessin de Luis Garcia en conserve intact le tranchant. Il cisèle une fresque sans pareille de ce que fut la longue nuit coloniale pour le peuple algérien. Ainsi El Djazaïr est aussi un moucharabieh de carbone où poser nos cils et voir pour apprendre ou se remémorer. Omar et Cava lui prêtent propos et plume, érudit et sans apprêts, économe et précise. Ils servent au mieux ce qui fut le dessein qui présida à leur oeuvre commune : faire entendre aux générations d’après l’indépendance ce que furent 124 ans de barbarie… Et 124 années de luttes pour se défaire du joug de la France. Jusqu’à ce 1er novembre 1954 où s’initia l’assaut final… Qu’ El Djazaïr vous soit utile à vivre et à bâtir de beaux lendemains.