Pour certains analystes, nous serions entrés, depuis peu, dans une modernité enfin réflexive, succédant à une modernité simple de la révolution scientifique puis de la révolution industrielle qui aurait été aveugles aux risques et aux effets secondaires de la civilisation technicienne sur l’environnement.
Mais sommes-nous les premiers à distinguer dans les lumières éblouissantes du progrès technique, l’ombre de ses dangers ? En occultant la réflexivité environnementale des sociétés passées, ce schéma simpliste dépolitise l’histoire longue de la destruction des environnements et altère notre possibilité d’appréhender lucidement la crise environnementale actuelle. Pour éviter cette amnésie, une histoire politique du risque technologique et de sa régulation sur la longue durée était nécessaire.
L’Apocalypse joyeuse expose l’entrée de la France et de la Grande-Bretagne dans la modernité industrielle (fin XVIIIe -XIXe siècle), celle des vaccins, des machines, des usines chimiques et des locomotives. Elle nous plonge au cœur des controverses vives qui surgirent autour des risques et des nuisances de ces innovations, et montre comment les critiques et les contestations furent réduites ou surmontées pour qu’advienne la société industrielle.
L’histoire du risque ici racontée n’est pas celle d’une prise de conscience, mais celle de la construction d’une certaine inconscience modernisatrice.