J’ai mon réseau d’hommes rudes, mes cafés d’ouvriers qui sentent la sueur, le métal et le goudron. (Parce que c’est dans les lits des pauvres que je me suis sentie heureuse et comblée ; au contraire de ceux des riches au creux desquels je me suis toujours sentie pauvre et misérable.)
Nicole a seize ans et mauvaise réputation. Celle que les Charentais pantouflards appellent la « Tu-baises » n’a rien d’une fille modèle. À répétition, elle cogne, vole, désire donc dérange. Avant que le torchon brûle, cette « fiancée du pirate » gagne les coins sombres de la Ville Lumière pour s’épanouir auprès de ses semblables : marginaux, crapules, prostituées, gosses esseulés, cinglés. Nicole Bley raconte, pour eux, le désir et la lutte d’un même élan brutal.
Paru en 1971 chez Jean-Jacques Pauvert, La Panthère bleue est un roman d’apprentissage pour sale gosse qui, de la première à la dernière page, vous caresse à rebrousse-poil. C’est tordu, torride et pourtant très tendre.
Lui est joint Lâche ton cul camarade, recueil d’essais publié chez le même en 1972 et ici augmenté d’inédits en volume. Un allume-feu féministe, joueur et jouissif qui concentre tous les espoirs de « Rêvolution » que nourrissait cette insaisissable soixante-huitarde.
Nicole Bley venait, disait-elle, de la campagne ou de la zone, ou des deux. Elle avait de mauvaises manières, c’était une guerrière, une petite Casque d’or soixante-huitarde mal embouchée. Elle fut l’une des premières admiratrices de Valérie Solanas dont elle hérite de la radicalité politique. Elle participa à la création du journal “très beau mais pas cher”, Zinc.
Elle brille comme le diamant noir de l’immédiat après-68 puis s’éteint brutalement, dans l’anonymat, en 1977.